"Il ressort de la discussion que le document Harbinson est très éloigné des préoccupations de l'Union européenne et les ministres n'ont pas pu l'accepter", a déclaré le ministre grec Georgios Drys, lors d'une conférence de presse à l'issue d'une rencontre avec ses homologues des Quinze.
Fait suffisamment rare pour être souligné, alors que l'agriculture est l'un des dossiers qui divise habituellement le plus les Quinze, la Commission "a reçu le soutien d'une très, très large majorité d'Etats membres", a indiqué un diplomate européen. "Il y a vraiment une Europe unie derrière Fischler", a-t-il ajouté.
Le commissaire à l'Agriculture a réitéré devant les ministres européens ses reproches de partialité à l'égard du document Harbinson, accusé de demander plus de sacrifices à l'UE qu'aux autres grands exportateurs agricoles comme les Etats-Unis ou les pays du groupe de Cairns (Australie, Canada, Brésil, etc).
Selon des sources concordantes, tous les ministres "se sont inquiétés" jeudi de l'absence de prise en compte par M. Harbinson des préoccupations dites "non commerciales", comme le principe de précaution qui peut amener l'UE à adopter des restrictions à l'importation de produits en cas de doute sanitaire.
Les Européens reprochent également au président du groupe de négociation sur l'agriculture à l'OMC de n'avoir pas proposé de "traitement différencié" entre les pays en développement, de manière à opérer une distinction entre les pays les moins avancés (PMA) nécessitant des accès favorisés aux marchés tiers et les gros exportateurs émergents comme le Brésil ou l'Inde.
Les Quinze s'inquiètent aussi d'un traitement déséquilibré entre les différentes formes de subventions à l'exportation.
Lors de son intervention devant les ministres, M. Fischler a souligné que "les membres de l'OMC, en particulier les Etats-Unis, qui usent des crédits à l'exportation et abusent de l'aide alimentaire pour subventionner leurs exportations de manière totalement anti-concurrentielle ne se voient pas demander, dans le document Harbinson, d'accepter une discipline comparable" à celle réclamée de l'UE.
Le commissaire a réclamé la révision du document pour arriver à une nouvelle version "équilibrée" reprenant l'ensemble des préoccupations européennes. "Autrement, le cycle de Doha ne mérite pas son nom de cycle de développement", a-t-il affirmé devant la presse.
"Ce que nous voulons, c'est l'équité. C'est un objectif légitime", a-t-il ajouté, assurant que l'UE n'était "pas isolée, même si certains le souhaiteraient". Le commissaire européen a mis en avant le soutien notamment du Japon et de la Chine.
L'Union Européenne a dévoilé en janvier 2002 des propositions pour les négociations agricoles à l'OMC qui suggèrent notamment une baisse de 45% des subventions à l'exportation, de 55% du soutien aux produits agricoles et une réduction globale de 36% en moyenne des droits de douane. |